Pourquoi s'amuserait-on à faire secours si on sentait son aile "pilotable" ? La seule raison que je vois à jeter le secours aura lieu si je sens que je n'ai plus d'options de pouvoir piloter mon aile non ? Donc pourquoi cette réponse éliminatoire ?
Parce que la sensation d’une aile pilotable n’est qu’une sensation qui a rarement un rapport exact avec la réalité,
Parce que si ton aile était pilotable, tu serais sorti de ton autorotation en moins d’un tour,
Parce qu'en autorotation, tu peux rester dans ton incident par excès de confiance (je sais piloter, je vais m’en sortir). L'autorotation peut t’amener à une instabilité spirale dont les risques sont la perte très rapide d’altitude et la perte de connaissance en cas de G prononcés, et là, plus possible de lancer le secours…
Le contexte de la question est celui d'un incident de vol ayant occasionné un départ en autorotation. Le problème consiste à savoir selon quel critère faire secours.
Pour se mettre "dans l'ambiance", il faut se rappeler que c'est le contexte qui occasionne le plus de décès en parapente chaque année de manière ininterrompue depuis que les accidents sont étudiés. En terme de pilotage, cette autorotation est plutôt impressionnante émotionnellement, étonnamment "confortable" physiquement (avant de se transformer possiblement en 360 engagé où les G vont se faire sentir) et surtout TRES CONSOMMATRICE DE HAUTEUR ( 25 à 30 m/s). A basse hauteur, il est avéré que la sortie du secours peut redresser l'attitude de l'aile et du pilote, ralentir ou stopper la rotation et diminuer le taux de chute donc ca vaut toujours le coup de faire secours même bas avec un effet incomplet. La faible hauteur n'est pas un critère d'empêchement (choix 1). Lors de l'incident, le départ en autorotation est rapide. Le pilote subit un effet de surprise et de sidération. S'il est très entrainé, il est possible de parer rapidement le problème.
Si au bout d'un tour la rotation se poursuit, cela signifie que :
- Le pilote n'a pas réussi à appliquer les bonnes corrections (Nous avons tous une limite à nos talents et c'est parfois très exigent).
- L'aile a pris de la vitesse en rotation et ne sortira plus seule.
- Le pilote risque la désorientation totale, voire une perte de connaissance si on bascule en 360 suite à une réouverture.
- Le pilote risque de sur piloter et ne rien résoudre.
- Le temps de passer par tous ces états, il a perdu 150, 200, 300 m ou plus et fonce vers la planète avec une vitesse de rapprochement de 100 km/h dont il n'a probablement pas conscience.
J'arrête là le tableau… Cela explique pourquoi cette situation est si méchante: c'est insidieux.
Il faut donc être fort et se dire :
- Je fais secours au bout d'un tour car j'ai perdu le contrôle de la situation et j'ai encore une solution qui va me sauver. Ce sera difficile car la théorie des petites pertes nous empêche de faire secours. (Ca m'embête de perdre le contrôle de la trajectoire en faisant secours alors que ca ne m'embête pas de risquer d'impacter à 100 km/h !): un tour est un bon critère de la limite de décision à ne pas dépasser pour éviter d'entrer dans un mauvais scénario.
- Dans une autorotation bien établie, la voile est toujours pilotable mais ce n'est pas un critère pour gérer la situation. Si on en est là involontairement alors il est déjà trop tard: pas d'état d'âme. SECOURS !
Bien sûr chaque situation concrète est unique mais j'espère que tu comprendras l'esprit qui anime cette réponse.