La Portance

Des idées reçues, des explications, des approximations…

Définition

Un aéronef placé dans un écoulement d’air subit une force aérodynamique. Pour l’analyse, on décompose cette force en une composante parallèle au vent relatif : la traînée, et une composante perpendiculaire au vent relatif : la portance. La portance est donc la force subie par un corps en mouvement dans un fluide qui s’applique perpendiculairement à ce mouvement. Voilà pour le côté sérieux. Sinon, c’est ce qui va nous permettre à nous de rester dans le ciel, ou plutôt de descendre moins vite que si nous étions en chute libre…

L’origine de la portance a fait l’objet de nombreuses théories à travers l’Histoire. De nombreuses théories plus ou moins fausses, mais aussi de nombreux amalgames et inexactitudes qui subsistent encore dans nombre de manuels et sites web pourtant récemment édités. Nous allons d’abord passer en revue les fausses bonnes explications de la portance.

Les fausses bonnes explications

Il y en a plusieurs, voilà à peu près ce que dit la plus répandue :

  1. Le profil d’une aile est dessiné de façon à ce que le chemin parcouru par une particule d’air soit plus long en passant par l’extrados que par l’intrados.
  2. Si deux particules d’air copines sont séparées (une passant par l’extrados et l’autre par l’intrados), il faut bien qu’elles se retrouvent à la fin (au bord de fuite).
  3. Comme il y en a une qui fait plus de chemin que l’autre, elle est obligée d’aller plus vite.
  4. Selon le théorème de Bernoulli, l’air s’écoulant plus vite sur l’extrados y applique une pression moins grande que sur l’intrados. La différence de pression est à l’origine de la portance.

Pour comprendre en quoi c’est faux, il suffit de se poser quelques questions :

  1. Si c’était vrai, la portance tirerait systématiquement un aéronef vers l’extrados. Comment un avion pourrait-il voler sur le dos, puisque le portance le ramènerait inexorablement vers le sol ?
  2. Ma main n’a pas un profil asymétrique (les ailes de l’avion des frères Wright non plus, d’ailleurs…). Pourtant, quand je la sors par la fenêtre de la voiture, j’arrive à ressentir une sacré portance !
  3. De plus, les tests en laboratoire montrent que les 2 particules d’air séparées au bord d’attaque ne se retrouvent pas au bord de fuite. Celle de l’intrados est tellement freinée qu’elle arrive même carrément à la bourre par rapport à sa copine.
  4. Ce qui est exact, c’est la différence de pression sur les deux faces du profil. Malheureusement, le théorème vient avec son équation, et la différence de pression calculée entre intrados et extrados reste infime par rapport à la portance mesurée effectivement.
Merci pour cet étourdi, un avion, ça sait voler à l’envers…
Cette dangeureuse cascade a été réalisée par un professionel. ne faites pas ça chez vous…
L’avion des frères Wright et ses ailes (presque) plates.
En envoyant des impacts de fumée synchronisés sur un profil d’aile, on s’aperçoit qu’ils sont loin d’arriver en même temps au bord de fuite.

La vraie bonne explication

Faites couler un filet d’eau à un robinet. Approchez-y le dos d’une cuillère. Qu’est-ce que vous constatez ? Le filet d’eau est dévié vers le côté, et la cuillère est attirée vers le filet d’eau.
Retournez l’image de 90°…
Remplacez la cuillère par un profil d’aile, et l’eau par de l’air. Et on obtient de l’air dévié vers le bas.

Votre aile est en fait une machine à balancer l’air vers le bas. Vous la faites mouliner par la 3e loi de Newton, qui dit que si vous appliquez une force (pour balancer de l’air vers le bas), une force inverse est appliquée, et la voilà, votre fameuse portance.

En fait, la force inverse, ça n’est pas tout à fait la portance, mais la Force Aérodynamique (autrefois nommée Résultante des Forces Aérodynamiques ou RFA). Le flux d’air subit un ralentissement parallèle à son écoulement, ce qui donnera par opposition la Trainée, et un mouvement vers le bas perpendiculaire à l’écoulement, ce qui engendre la Portance.

Mais vous allez me dire : « Et mon profil plat, comment il balance l’air vers le bas ? ». Ben c’est là que l’incidence entre en jeu. C’est en appliquant la bonne incidence en fonction du profil de son aile qu’on trouvera la portance correcte.

Et Bernoulli, alors ?

Me faites pas dire ce que j’ai pas dit, non plus. Le théorème de Bernoulli est correct, c’est juste que, comme on l’a vu, les bases sur lesquelles on l’applique sont incorrectes. En fait, si on faisait les calculs avec les bonnes bases et notamment les bonnes vitesses, on obtiendrait les bons résultats.

Le coin des matheux

Pour calculer la portance, on utilise la formule suivante : 

P=1/2.ro.V^2.S.Cz

Avec ro qui est la masse volumique de l’air, V la vitesse sur trajectoire, S la surface de référence de l’aéronef, et Cz le coefficient de portance. On s’aperçoit vite que de tous ces chiffres, il n’y en a qu’un que nous autres pauvres pilotes pouvons faire évoluer, c’est la vitesse. Et que si vous avancez 2 fois plus vite, vous augmenterez votre portance par 4.

Et voilà enfin révélée sous vos yeux ébahis une des vérités fondamentales du parapente : Voilà pourquoi, sur la pente école ou au décollage, votre moniteur n’a pas arrêté de vous crier : « Cours, cours !!! ».

Pour aller plus loin…

Bon, elle est jolie, cette explication, mais vous ne me croyez toujours pas. C’est normal, on vous a répété depuis que vous êtes jeune padawan que les particules d’air sont des copines qui n’aiment pas rester séparées trop longtemps. Pour vous convaincre du contraire (et si vous lisez l’anglais), allez faire un tour sur le site de la NASA qui raconte à peu près la même chose qu’ici (ce sont de vilains copieurs, je sais…). Vous trouverez en rab deux autres fausses bonnes explications de la portance (par effet ricochet et par effet Venturi). Sinon, vous pouvez aussi regarder cette vidéo bien faite et sous-titrée en français.
Les plus férus de mécanique des fluides pourront gougueliser les termes suivants et trouveront tout plein d’équations à se mettre sous les neurones en plus des explications : Voilà, le cours est fini… Vous pouvez ranger vos cahiers.

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