Chemin de traverse

La route s’étend devant moi, comme un long tapis clair ondoyant au rythme des collines qui lui impriment son profil et ses courbes. Je pourrais presque rouler sans les phares. Nuit de pleine lune : l’astre rougeoyant au-dessus de l’horizon du fleuve alors que je traversais le long pont qui l’enjambe est maintenant suffisamment haut dans le ciel. Luisant de sa plus belle blancheur, il fait briller les éclats de mica du bitume, et la forêt qui le borde des deux côtés paraît encore plus sombre en contraste, presque menaçante.

Eldorado business

Je suis pressé, à la bourre comme d’hab : j’avais rendez-vous à 19:30 et j’ai déjà un quart d’heure de retard. J’ai failli ne pas la voir, occupé que je suis à pester contre les personnes qui me précèdent sur la route étroite, en les traitant de « conducteurs du dimanche ». Il faut dire qu’elle s’est installée dans le coin certainement le plus sombre et le plus étroit de la route. Je passe en trombe devant elle, et au dernier moment, j’aperçois sa main à peine tendue, timidement, et les deux gamins à ses côtés. Alors je pile ; la décision a pris moins d’une fraction de seconde, et j’ai déjà passé la marche arrière.

Au pied du mur

Nom de Dieu ! Qu’est ce que j’ai la trouille, moi. Ça me visse au corps, ça me file la nausée, ça m’empêche de dormir. Je n’y crois pas ! Moi ? Ça m’empêche de dormir ? Moi, qui suis capable de me coucher à même le carrelage le plus glacé, et là de simplement fermer les yeux pour sombrer en moins de cinq minutes…